Que penser de la dévotion au scapulaire du Mont Carmel ?
En 1251, la Vierge Marie est apparue à un frère carmélite anglais, saint Simon Stock, et lui a présenté le scapulaire brun adopté par cet ordre. Elle lui a dit que les religieux, religieuses et les laïcs qui le porteraient avec dévotion échapperaient aux flammes de l’enfer, promettant d’intercéder pour que leur purgatoire éventuel prenne fin le premier samedi après leur mort.
La dévotion à Notre Dame, Fleur du Carmel, s’est développée au cours des siècles suivants et, en 1726, elle est devenue une fête de l’Église universelle.
Que penser de cette dévotion à un morceau de tissu brun, à sa couturière céleste et à ses grandes promesses ? S’agit-il d’une pensée magique, d’une superstition selon laquelle on peut tromper la mort ou les flammes de l’enfer simplement en portant un objet ?
La première chose à noter est qu’il ne s’agit pas tant de mourir avec le scapulaire que de vivre avec ! Pour obtenir les promesses, les membres de la Confrérie du Scapulaire prient, jeûnent et vivent chastement selon leur état, imitant les vertus de Notre Dame dans la contemplation et l’action.
Nous imitons la contemplation de Marie. Selon la tradition, lorsque l’ange lui a annoncé l’Incarnation (Lc 1, 26-28), Marie était en train de contempler les Écritures. Saint Luc rapporte que Marie « s’émerveilla » et « garda précieusement dans son cœur » ce qu’elle avait entendu et vu concernant son petit enfant (Lc 2, 18, 33, 48, 51). Elle l’a accompagné tout au long de son ministère, jusqu’à la croix (Jn 2, 1-12 ; 19, 25-27 ; Lc 8, 1-3). Elle était là, priant à nouveau à l’approche de la Pentecôte (Ac 1, 14). Sa vie était consacrée à méditer ce que Dieu avait fait, ce qu’il faisait et ce qu’il ferait. Le scapulaire brun nous invite à imiter la Vierge dans son esprit contemplatif.
Nous imitons également l’action de Marie. Après avoir discerné la volonté de Dieu pour elle, Marie a donné son fiat, son grand « oui » (Lc 1, 38) – et s’est « aussitôt » mise au travail, servant sa cousine Élisabeth (Lc 1, 39, 56), chantant les louanges de Dieu (Lc 1, 46-55, etc.), voyageant avec Joseph et Jésus à Bethléem, en Égypte, à Nazareth et à Jérusalem (Lc chap. 2 ; Mt chap. 2). Elle a fait tout ce qui était humainement et religieusement requis pour son fils (Lc 2, 7, 21-52). Nous ne pouvons certes porter ou allaiter l’Enfant Jésus, mais nous pouvons nous joindre à Marie pour dire « oui » à notre mission, porter la Parole de Dieu aux autres et l’incarner dans nos vies.
Ainsi porter son scapulaire brun non seulement autour de notre corps mais aussi autour de notre âme, c’est entendre la voix de Dieu et obéir à ses commandements, à être la mère et les frères et sœurs du Christ en écoutant ses paroles et en les mettant en pratique.
Beaucoup de gens aujourd’hui sont des athées en pratique. Pas des athées déclarés : ce n’est pas qu’ils croient positivement qu’il n’y a pas de Dieu, mais ils vivent comme si Dieu n’existait pas, de sorte qu’Il n’a aucune emprise sur leur vie. Pour eux, porter un scapulaire brun n’a peut-être aucun sens.
Mais pour les vrais croyants, nous devons écouter l’appel de la Fleur du Carmel, la Vierge Marie, à écouter et à faire la volonté de Dieu. Après tout, le seul commandement que Marie a prononcé dans le Nouveau Testament est « Faites tout ce que Jésus vous dira » (Jn 2, 5). C’est cette réponse obéissante à la grâce divine, le fait de ne pas porter de vêtements particuliers, qui fait de nous des saints ; comme Marie, nous donnons notre consentement sans réserve et, par nos paroles et nos actes, nous accomplissons ce consentement jour après jour.
Cela ne veut pas dire que les symboles extérieurs sont inutiles.
Dieu aurait pu nous racheter sans prendre chair humaine, et toute vie corporelle implique le port de vêtements. Jésus aurait pu nous sauver par un acte mental ou un simple décret, sans vivre et mourir comme vous et moi. Mais Dieu sait que nous ne sommes pas des esprits purs : nous sommes des corps animés, des esprits incarnés, et l’univers physique a de nombreuses répercussions sur nous.
Ce que nous portons a de l’importance : cela influence notre façon de nous sentir et de nous comporter, cela communique aux autres qui nous sommes et ce à quoi nous accordons de la valeur. Vous venez à la messe dans vos « habits du dimanche », pas en maillot de bain.
De même, le scapulaire du Mont Carmel sert de rappel personnel et de reconnaissance publique de notre mission et de notre identité. En vivant à la manière de Marie, nous revêtons notre âme de la laine de la contemplation, des fibres de coton des bonnes œuvres, des fils de soie de la parole de Dieu et des sacrements, et c’est là la meilleure formule pour notre vie et notre mort.
Alors que Jésus s’apprêtait à quitter ce monde, il nous a fait trois cadeaux d’adieu : l’Eucharistie, notre nourriture pour le voyage ; le Saint-Esprit, notre inspiration ; et sa mère Marie, qui est aussi la nôtre. Son petit habit brun est un gage de cette protection maternelle.
Extrait d’une homélie de l’archevêque de Sydney (Australie) Anthony Fisher OP, le 7 août 2025 Catholicweekly.com

Anthony Fisher
L’évêque Anthony Fisher, dominicain, est le nouvel archevêque de Sydney.




