Nous avons rencontré l’abbé Célestin Kapombé qui, depuis plus de 2 ans, est chapelain de la communauté des Augustines à Gouarec. Originaire du Congo, il nous a présenté son parcours, ses passions. Il nous a parlé de sa vie de prêtre en France, en soulignant les nombreuses différences entre notre Eglise et celle d’Afrique.
Parlez-nous de votre enfance :
J’ai 65 ans, je suis né au Congo, un pays de 80 millions d’habitants qui compte 80 % de chrétiens, dont 2 tiers de catholiques et 1 tiers de protestants. C’est une ancienne colonie belge. Je suis le 2ème d’une famille de 10 enfants dont 5 garçons et 5 filles. Maman est décédée lorsque j’avais 7 ans et papa s’est remarié 7 ans plus tard.
Quelle profession exerçait votre père ?
Papa était enseignant en école primaire, mais suite à un problème de santé il est devenu cultivateur. Il produisait du maïs, du manioc, des bananes, des arachides…
Et à l’école ?
Pour les 3 premières années je suis allé à l’école catholique du village et les 2 suivantes à 20 kilomètres de notre domicile, je logeais chez un parent. Ma première langue maternelle est le tshinuba mais l’école était en français. Ensuite je suis allé dans un collège à 250 kilomètres, en étant hébergé chez un oncle paternel durant 2 ans. Je suis alors entré dans une autre école, pour 5 années, jusqu’au baccalauréat, option humanités sociales. Les élèves étaient motivés car les familles mettaient beaucoup d’espoir dans l’enseignement pour s’en sortir.
Vous avez alors travaillé ?
Oui, durant 2 ans j’ai enseigné le français et l’histoire à Kinshasa, la capitale. C’est durant cette période que j’ai ressenti en moi le souhait de rentrer au séminaire. J’en ai parlé à mon père qui, bien que très croyant et catholique, a été déçu. Toutefois, il m’a laissé libre dans mon choix. Je me suis adressé au curé de ma paroisse qui m’a mis en relation avec le grand séminaire. Durant 2 ans j’ai vécu une période de discernement avec des temps sur la paroisse et des récollections au séminaire.
Et vous êtes devenu séminariste ?
Oui, nous étions 17 jeunes à nous engager pour 3 années de philosophie, suivies de 4 années de théologie. Le 1er août 1985 j’ai été ordonné prêtre avec 6 autres jeunes de notre groupe de 17. De 1985 à 2008 j’ai été nommé pour des périodes de 2 à 6 ans dans une dizaine de paroisses de la capitale Kinshasa.
Et vous êtes venu en France ?
Oui en 2008. Il fallait que je reçoive une greffe de la cornée dans chaque œil et cela n’était pas possible chez nous. Ayant mon cousin germain, l’Abbé Jean Mabundi, en France depuis une vingtaine d’années, il a parlé de mon dossier à Monseigneur Fruchaud. Je suis donc arrivé sur la paroisse de Lamballe avec l’Abbé Paul Lorend durant
une année et ensuite l’Abbé Pierrick Jégonday. En 2010, je suis parti à Quintin pour 4 années. En 2014, j’intégrais la cathédrale de St-Brieuc au service de la paroisse.
Et vous êtes venu à Gouarec ?
Oui en septembre 2015 je suis venu comme chapelain auprès des sœurs Augustines, en remplacement du Père François Gauthier. Je célèbre la messe tous les jours à la chapelle des sœurs, sauf le samedi où je vais à l’EHPAD de la maison St Joseph. J’assure les confessions à la communauté ainsi que les visites à l’EHPAD et je continue mes soins pour mes yeux. J’ai été heureux de retrouver un ami du Congo, le Père Georges, qui est prêtre à Callac.
Quels changements vous ont le plus marqué ici ?
Le régime alimentaire avec une dominante de la pomme de terre dans presque tous les repas ! Ça ne me rassasiait pas, j’avais toujours faim (rire). J’ai aussi découvert la neige en arrivant. J’ai apprécié le bon réseau routier que vous avez. J’ai été frappé par l’accueil ici : celui de Monseigneur Fruchaud qui m’a fraternellement serré dans ses bras à notre 1ère rencontre. Dans toutes les paroisses où je suis passé, j’ai toujours été bien accueilli par les curés et les paroissiens. J’ai également été très bien accueilli à Gouarec, que ce soit dans la communauté ou par les habitants.
Avez-vous des passions ?
Oui, j’ai la passion du foot. Je n’ai jamais été un grand joueur mais tous les week-ends j’allais aux matchs des petites et des grandes équipes. J’étais délégué pour contrôler le bon déroulement des matchs et encadrer les arbitres, au niveau amateurs et même professionnels. Ici je suis un inconditionnel de Guingamp que je vais voir 2 ou 3 fois par an. Je suis abonné à bein sport et je regarde du foot presque tous les soirs !
Quelles différences avez-vous relevées avec la religion ?
Chez nous l’organisation n’a rien à voir. Pour célébrer, le prêtre est très entouré par de nombreux enfants de chœur, plusieurs chorales et de nombreux responsables de la communauté et de mouvements. Quand nous célébrons nous ne sommes pas pressés par l’heure comme ici. Pour les grandes occasions les messes peuvent durer 4 heures et personne n’est fatigué ! Tous les 2 ans lorsque je reviens au pays ils me taquinent en disant que mes homélies sont trop courtes !
Comment voyez-vous l’avenir de l’Eglise ici ?
L’avenir ne dépend pas de nous mais de l’Esprit Saint qui connaît les hommes et les époques. Pour le moment nous constatons une certaine léthargie religieuse et l’avenir semble compromis. Nous ne devons pas désespérer mais faire confiance à l’Esprit. L’Eglise dans son histoire a connu des hauts et des bas. Moi je crois en la présence de l’Esprit. J’ai confiance dans la prière des communautés qui s’organisent et se rassemblent. Ce que j’apprécie ici, c’est la détermination et le dévouement des chrétiens qui s’engagent. C’est ça l’avenir.
Propos recueillis par Maryvonne et Christian Rault