Nous catholiques sommes attachés à fêter notre Mère, déjà participante de la joie du Ciel. Mais ce n’est pas seulement une question de sentiment, c’est une vérité bien établie, fondée en tradition, qui jette un jour très inattendu sur toute notre vie future auprès de Dieu, et qui éclaire en même temps notre chemin présent.
Le dernier voyage de Marie
L’Assomption est à bien distinguer de l’Ascension, même si, dans les deux cas, il s’agit d’aller au Ciel ! Avec l’Assomption, c’est Marie, la mère de Jésus, qui monte vers les célestes demeures, tandis que Jésus a connu antérieurement une Ascension qui nous est racontée dans les Évangiles (Marc XVI, 19 ; Luc XXIV, 50-53) et les Actes des Apôtres (I, 9-11). L’Assomption n’est pas rapportée dans le Nouveau Testament, tout au plus des allusions (Apocalypse XII, 1-17) ; mais elle est connue grâce à un texte reçu très anciennement dans toutes les Églises, le Transitus Mariæ (ou voyage de la sainte Vierge Marie).
Il montre Marie s’éteignant dans la paix à Jérusalem sur le mont Sion, les Apôtres se rassemblant autour d’elle pour faire le service funèbre et l’emmener dans la vallée du Cédron où une tombe neuve l’attend. C’est là que Jésus vient en personne prendre charge de sa Mère qu’il élève au Ciel corps et âme.
L'Assomption et la Dormition
L’Orient et l’Occident chrétiens ont eu des approches différentes de ce mystère que les Grecs appellent « Koïmèsis » (traduit par Dormition), tandis que les latins ont plus mis l’accent sur la deuxième phase du processus : sa montée en gloire. Le pape Pie XII, qui a fait entrer l’Assomption dans le concert des vérités de foi professées par l’Église catholique (Constitution apostolique Munificentissimus, 1er novembre 1950), n’a pas voulu préciser le mode de la glorification de Marie : est-elle morte et ressuscitée comme Jésus ? Ou a-t-elle directement rejoint le Ciel, sans passer par la mort, comme on l’a pensé au Moyen Âge ? L’Assomption, avec ou sans Dormition, est donc la conclusion nécessaire de la vie de la Vierge Marie.
Le dogme de l'Assomption
C’est le dernier précisé des dogmes concernant Marie (l’avant-dernier étant l’Immaculée Conception, définie par Pie IX en 1854). Le texte officiel de l’Église catholique sur l’Assomption est la Constitution apostolique Munificentissimus Deus de Pie XII en 1950. Dans ce document, le Pape proclame solennellement le dogme de l’Assomption : « Par l’autorité de Notre Seigneur Jésus-Christ, des Bienheureux apôtres Pierre et Paul et par notre propre autorité, nous affirmons, nous déclarons, nous définissons comme un dogme divinement révélé que l’Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours Vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme à la gloire céleste. » Il repose sur un large consensus dans la tradition ancienne – plusieurs Pères de l’Église en ont parlé (saint Jean de Damas, saint Denys l’Aréopagite…) – ; très tôt la Dormition et le triomphe de Marie ont été représentés dans d’innombrables fresques, vitraux, tableaux.
La fête du 15 août, qui semble venir de Jérusalem, est également très ancienne. Elle est célébrée dans toutes les Églises d’Orient comme dans l’Église latine bien avant la proclamation de 1950. C’est ainsi que, le 10 février 1638, le vœu du roi Louis XIII, remerciant le Ciel pour la grossesse tant attendue de sa femme Anne d’Autriche (obtenue après des neuvaines à Notre-Dame de Grâces à Cotignac), fait de l’Assomption le jour de la fête nationale du royaume de France. De nombreuses églises de France portent ce vocable, de Chantilly (Oise) jusqu’à Nice (Alpes-Maritimes), en passant par Passy (Paris). Notre-Dame de l’Assomption est d’ailleurs proclamée patronne principale de notre pays par le pape Pie XI le 2 mars 1922.
Unie à Dieu
La fête de l’Assomption de Marie est pour toute l’Église une grande joie, elle y voit l’annonce de ce que sera sa propre glorification, lorsque le Seigneur reviendra juger les vivants et les morts et qu’il fera entrer son Peuple dans la Jérusalem céleste. Elle y voit la preuve que tout ce qui constitue notre histoire sur terre peut être un chemin vers le Ciel, si nous le vivons en union avec Dieu. Puisque Jésus veut près de lui celle qu’il a tendrement aimée sur la terre, nous croyons que le bonheur du siècle à venir n’est pas désincarné, que nous entrainerons avec nous tous ceux que nous avons aimés, pourvu que nous les ayons aimés dans la lumière du Christ.
Père Michel Gitton
Le père Michel Gitton est prêtre du diocèse de Paris. Il est également le fondateur de la communauté Aïn Karem qui réunit des clercs, laïcs consacrés et des laïcs pour l'évangélisation,