Santjago est arrivé à Gouarec avec sa famille en 2016. Il avait 9 ans et il venait d’Albanie, son pays natal. Lui et sa famille se sont rapidement intégrés ; l’accueil et les solidarités locales dans la paroisse et la population les ont profondément touchés
Veux-tu te présenter ?
Je m’appelle Santjago Kolbucaj. Je vais avoir 19 ans en décembre. Je suis né en Albanie à Shokoder. Je suis l’aîné d’une fratrie de trois enfants, mon frère a 15 ans et ma sœur 9 ans. Nous sommes arrivés en France en septembre 2016.
Quels souvenirs as-tu gardés de ton enfance en Albanie ?
J’en ai gardé de très bons, en particulier au sein de ma famille, avec mes grands[1]parents, mes oncles et mes tantes, et dans les écoles que j’ai fréquentées. J’en ai conservé des mauvais pour les raisons qui nous ont fait quitter précipitamment notre pays.
Peux-tu nous en dire plus ?
En Albanie, il existe une loi très ancienne, le Kanun, qui est la vengeance entre familles de génération en génération. Cette situation arrivait sur mon père qui a reçu des menaces de mort. En une semaine nous avons dû quitter le pays sans savoir où nous allions, c’était l’inconnu. Nous sommes arrivés à Metz où nous sommes restés 40 jours dans un camp de réfugiés, en tente et dans la boue. Puis nous avons obtenu un logement et le CADA (centre d’accueil des demandeurs d’asile) nous a fait venir à Gouarec.
Ce fut une bonne nouvelle ?
J’en garde des souvenirs incroyables. Après avoir vécu dans un camp de réfugiés nous arrivions dans le magnifique petit bourg de Gouarec si bien fleuri. Nous avons été logés d’abord dans l’ancienne gendarmerie, puis dans la petite maison de la communauté des Augustines, ensuite dans un logement près de l’école publique, dans un autre près de l’église et, actuellement, ma famille habite dans un appartement de l’ancienne école Saint-Georges. Papa est décédé depuis 4 ans.
Êtes-vous retournés en Albanie ?
Oui, nous y sommes allés voilà deux ans passés, deux semaines au moment de Noël. C’était bien car ça m’a permis de revoir ma famille mais, au final, j’étais pressé de rentrer en France où j’ai toutes mes relations. Au niveau de mes papiers, je possède un titre de séjour français que je dois renouveler chaque année. Je pense demander la nationalité française mais c’est un long parcours.
Et ta scolarité ?
J’ai fait mon CM2 à l’école publique de Gouarec. La 6ème au collège Édouard Herriot à Rostrenen, pris en charge par le CADA, et pour la suite ce fut entre le collège et le lycée privés de Gouarec et Campostal où j’ai obtenu un bac ST2S (Sciences et technologies de la santé et du social), en juin dernier. Depuis l’âge de 16 ans j’ai profité de mes vacances pour travailler dans une crêperie à Bon-Repos et à la maison de retraite de Gouarec. Cette dernière expérience m’a vraiment passionné. Actuellement, je suis à Brest en BTS économie sociale et familiale. Je souhaite ensuite poursuivre vers des études d’assistant social. En plus des cours, je suis à la recherche d’un travail sur Brest pour m’aider à financer mes études.
Tu es catholique ?
En effet, je suis né dans une famille catholique et j’ai grandi avec cette religion. J’ai été baptisé en Albanie, j’ai suivi ici le caté avec sœur Marie[1]Emmanuelle et Louis Le Mée. J’ai fait ma première communion, ma profession de foi et ma confirmation. J’ai été servant d’autel dans la chapelle de la communauté et dans les églises de la paroisse. De nombreuses personnes, ici, m’ont marqué dans ma foi : je pense aux sœurs Augustines, à Jean Pierre Flamery, à Louis Le Mée…
Es-tu allé en pèlerinage ?
Oui, quatre fois à Lourdes. La première fois j’étais en 5ème et je suis allé avec le pélé ados du diocèse. Je suis retourné en 2020 avec notre équipe du MRJC (mouvement rural de la jeunesse catholique) de Rostrenen. Nous étions six jeunes, entourés par Noémie Rault, l’animatrice du MRJC. En 2023, je suis allé en tant qu’hospitalier avec huit jeunes de Campostal, encadrés par Mme Isabelle Vidie-Rodallec, professeur au lycée, et c’est là que j’ai fait la connaissance du père Gaëtan qui venait de s’installer dans notre paroisse. Nous étions 60 jeunes du diocèse au service des malades. En avril dernier, je suis retourné en tant qu’accompagnateur du pélé ados avec Louis Le Mée et le père Delphin. Cette expérience d’animation a fait que ce soit le plus beau de mes pèlerinages.
Que penses-tu de notre Église ?
Lorsque je suis retourné en Albanie, je suis allé à la messe de Noël mais je préfère de beaucoup les célébrations à la française. L ‘assemblée ici est nettement plus accueillante et fraternelle. Il faut dire que notre famille a toujours été incroyablement bien accueillie et aidée, ici, en paroisse, par la communauté des Augustines, les personnes de Gouarec et des alentours. À Brest, j’ai eu l’occasion d’aller à la messe, il y a beaucoup plus de jeunes, mais en ville c’est peut-être plus difficile de créer des liens. Depuis le mois de janvier, je fais partie de l’EAP (équipe d’animation paroissiale) de Gouarec. J’ai été impressionné de voir toutes ces personnes qui se préoccupent des autres paroissiens et qui souhaitent attirer des jeunes. Maintenant que je suis à Brest, ce sera plus compliqué d’assister aux réunions.
