Quel est votre parcours ?
Prêtre du diocèse de Luebo, en République Démocratique du Congo je suis le cinquième d’une famille nombreuse (17 rejetons). Mon nom (Mutshipayi) relevant des traditions apparentées à celles des ancêtres dans la foi que sont les Hébreux, signifie « maudissez-le ». Pourquoi ? Interrogez mon grand-père dont je porte ce nom. Il saura vous en donner l’origine. Depuis le 10 août de l’année en cours, j’ai totalisé 28 ans de ministère presbytéral à l’issue d’un parcours de combattant : 6 années de petit séminaire classique ; 3 ans de vie religieuse dans la société salésienne de Don Bosco ; 5 années d’études supérieures débouchant sur une licence (équivalent de la maîtrise en France) en pédagogie appliquée, option « Géographie » ; 4 années d’études à la Catho de Paris – licence en STBS – ; 3 ans de ministère comme prêtre « fidei donum » à Douala au Cameroun ; 2 ans de licence en théologie morale aux Facultés Catholiques de Kinshasa ; 2 ans comme responsable diocésain de l’enseignement catholique et 12 ans au service de la Conférence Episcopale Nationale du Congo en tant que secrétaire de la Commission Episcopale de l’Education Chrétienne, chargé de la coordination nationale de toutes les écoles conventionnées catholiques du pays.
Pouvez-vous nous parler de votre pays ?
La R.D. du Congo est située à cheval sur l’équateur, au cœur du continent africain. 5 fois la superficie de la France ; une population de plus ou moins 70 millions d’habitants dont plus des ¾ se réclament de la confession chrétienne. Cuivre, or, cobalt, zinc, manganèse, uranium, diamant, coltan (ce minerai sert à la fabrication des puces de téléphones) ; une vaste forêt : 800.000 Km2 ; une terre très fertile, notamment dans la partie longeant le graben oriental ; autant de richesses du sol et du sous-sol qui font aujourd’hui le malheur de ce géant aux pieds d’argile dont les fils et filles vivent sous l’occupation d’une gazelle lourdement soutenue par des léopards. L’enseignement encore acceptable en R.D. du Congo se puise, pour 80%, dans les écoles conventionnées catholiques. J’ai coordonné lesdites écoles 12 ans durant, confronté à un pouvoir qui, visiblement, ne trouve aucun intérêt à la formation des futurs cadres du pays. Disciple d’un certain M.L. KING qui estimait que « la chance pour l’Eglise, c’est de retrouver sa vocation foncièrement subversive et d’apparaître comme la seule contestation radicale d’un monde orgueilleux et décomposé ; que sa force ne viendra jamais de ses choix politiques, mais de son intransigeance face aux manipulations des puissants » (La Force d’aimer). J’ai eu à en découdre avec ce pouvoir assassin de la jeunesse, à telle enseigne qu’au terme de mon dernier mandat en tant que répondant de l’Eglise auprès de l’Etat dans le secteur de l’enseignement, mon évêque a préféré m’éloigner momentanément de cette sphère.
Comment envisagez-vous votre mission dans notre région ?
Après deux années passées à Paris et en banlieue parisienne et, à la suite des entretiens entre Monseigneur Denis MOUTEL et mon évêque, je suis appelé à « vivre la joie de l’Evangile » avec mes frères et sœurs en Christ du secteur pastoral de Rostrenen. La mission dont je suis porteur s’inscrit dans le projet pastoral de l’évêque du lieu à qui ont été confiées les brebis du Seigneur. Du coup, celui qui aimerait en cerner les contours sait à quelle porte frapper. Sachant pour ma part, que je me trouve devant une nouveauté, je me donne pour stratégie de calmer mon impatience, de surmonter tout étonnement et d’imposer silence aux préjugés. En tout état de cause, ma devise se voudrait : « Fleuris là où tu es semé »
Propos recueillis par Joël Le Biavant