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Image par James Wheeler de Pixabay

La Pentecôte, Babel, et la diversité…

L'épisode de la tour de Babel
se révèle d'une saisissante actualité

On entend souvent dire que la Pentecôte est une « anti-Babel ». Il est vrai que, selon l’Écriture, au moment du célèbre épisode de la tour de Babel, les hommes ont été dispersés par la confusion linguistique (Genèse 11, 1-9), tandis qu’à la Pentecôte, l’Esprit Saint les a réunifiés par le don des langues donné aux apôtres (Actes, 2). Tout cela est bel et bon, mais approfondissons un peu

« Faisons-nous un nom… »

Après le Déluge, les descendants de Noé entreprennent de construire une immense tour de briques : « Allons ! bâtissons-nous une ville et une tour dont le sommet touche au ciel, et faisons-nous un nom, afin que nous ne soyons pas dispersés sur la face de toute la terre » (Gen.11,4). La pointe du projet transparaît dans l’expression centrale du verset: « Faisons-nous un nom ». Cette expression d’apparence anodine a une immense portée : au moment de la création, en effet, Dieu a donné à l’humanité le pouvoir de nommer les êtres qui lui sont subordonnés, mais pas de se nommer elle-même. Se nommer soi-même, c’est une sorte de folie réflexive, un rêve d’auto-engendrement. C’est prétendre ne rien recevoir, ne rien devoir à personne. C’est l’impiété parfaite, l’orgueil achevé, la pride absolue. Car, en toute rigueur, le seul à s’être fait lui-même son nom, c’est Dieu. Les juifs, d’ailleurs, appellent Dieu « le Nom» (Hashem). Et nous-mêmes, chrétiens, nous disons à leur suite : « Il n’y a sous le ciel aucun autre nom par lequel nous devions être sauvés » (Actes 4, 12).

Les rêves de la modernité

La tour est ainsi beaucoup plus qu’une tour ; c’est un projet visant à acquérir une parfaite autarcie, une totale sécurité, une indépendance radicale à l’égard de la Création et de son Créateur. Se couper de la nature, s’éloigner du sol, tout artificialiser, vivre pour toujours dans une ville gigantesque, dans les étages d’un gratte-ciel sans limite… Tout y est. Platon n’est pas le seul à avoir anticipé les rêves de la Modernité; la Bible aussi les a décrits. Un midrash saisissant rapporte même que, sur cette tour en perpétuelle construction, puisqu’elle s’était donné un terme inatteignable, la vie des personnes ne comptait plus autrement que comme un moyen au service de la tour.

La vie des personnes ne comptait plus

On peut voir là une prophétie de l’objectif de croissance infinie que la société moderne s’est donné depuis trois siècles :d’abord présentée comme un moyen au service de l’homme et de ses aspirations, l’économie finit par devenir autonome et par imposer ses fins propres. On ne produit plus pour satisfaire des besoins réels, on crée des besoins artificiels pour permettre la production, et accroître ainsi le volume du PIB. L’abstraction quantitative devient une fin en soi qui dévore toute réalité vivante, comme un Moloch

La diversité n'est pas mauvaise en soi

Mais revenons à la tour. Pour mener à bien ce projet d’autonomie totale, il importait que l’humanité fût uniformisée, fondue en un seul bloc, unie par une seule langue, menée par un seul Gouvernement – mondial? –, lui-même tout dévoué à la tour. L’Éternel ne s’y trompe pas : « Voici, ils forment un seul peuple et ont tous une même langue, et c’est là ce qu’ils ont entrepris ; maintenant rien ne les empêcherait de faire tout ce qu’ils auraient projeté » (Gen.11, 6).

L'Esprit Saint ne parle pas le "globish"

Il décide donc de mettre fin à cette entreprise luciférienne. Il rétablit la diversité des langues parmi les bâtisseurs de la tour, et provoque leur dispersion en autant de peuples. Or, et c’est le point capital, il ne faut pas voir dans cette diversité un mal, qui serait infligé par punition, mais un bien naturel. Ce qui est un mal, assurément, c’est la mésentente, la discorde, mais elles sont des maux indirects, qui ont l’heureuse conséquence d’empêcher la construction de la démente cité idolâtrique. La diversité culturelle des communautés, quant à elle, est la forme naturelle de la vie humaine : il n’y a pas lieu de vouloir l’éradiquer.

Régénération des différences culturelles

C’est pourquoi justement, au moment de la Pentecôte, l’Esprit Saint ne vient pas annuler, ni contester la diversité linguistique, mais la consacrer : « Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres, et se posèrent sur chacun d’eux. Et ils furent tous remplis du Saint-Esprit, et se mirent à parler en d’autres langues » (Actes 2, 3-4). La proclamation de la Bonne Nouvelle auprès de l’humanité tout entière n’a jamais supposé la suppression des différences culturelles, mais seulement leur régénération, de l’intérieur, par le souffle de l’Esprit.

Il y a évidemment quelque chose d’universel en l’homme – la dignité de fils de Dieu, appelé à la vision béatifique – mais cette chose universelle n’a d’existence concrète, ici-bas, qu’incarnée dans une particularité – qui doit être respectée. La langue universelle, le gouvernement mondial, le village global – tous ces songes babéliens – sont profondément contraires à la nature sociale des hommes, car ils supposent, pour être réalisés, l’atomisation préalable du corps social, l’arrachement à la nature, l’arrachement à l’héritage.

L’Esprit Saint ne parle pas le « globish », il « parle à chacun sa propre langue, sa langue maternelle » (Actes 2, 5).


Publié dans France Catholique  N°3726

Frédéric Guillaud

Frédéric Guillaud, ancien élève de l’École normale supérieure, est agrégé de philosophie.

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